Ryūnosuke Akutagawa “Le Sourire des dieux” 5/7 芥川龍之介 「神々の微笑」

Voici la suite de la partie 4/7.

「ところが実際はあるのです。まあ、御聞きなさい。はるばるこの国へ渡って来たのは、泥烏須デウスばかりではありません。孔子こうし孟子もうし荘子そうし、――そのほか支那からは哲人たちが、何人もこの国へ渡って来ました。しかも当時はこの国が、まだ生まれたばかりだったのです。支那の哲人たちは道のほかにも、の国の絹だのしんの国の玉だの、いろいろな物を持って来ました。いや、そう云う宝よりも尊い、霊妙れいみょうな文字さえ持って来たのです。が、支那はそのために、我々を征服出来たでしょうか? 

(あおぞら文庫:https://www.aozora.gr.jp/cards/000879/files/68_15177.html

 « Mais si, il existe en fait ce qui l’emporte sur Deus. Veuillez bien m’écouter. Ce n’est pas seulement Deus qui est venu de loin dans ce pays. Confucius, Mencius, Zhuangzi — et d’autres philosophes sont venus de la Chine à travers la mer. À ces époques ce pays venait de naître. À part la pensée de la Voie, ils ramenaient les soies du royaume de Wu et les trésors de l’État de Qin, et tant d’autres. En outre, ils ont apporté les sacrés caractères chinois, plus précieux que ces genres de trésors. Pourtant, la Chine nous a-t-elle conquis ?


たとえば文字もじを御覧なさい。文字は我々を征服する代りに、我々のために征服されました。私が昔知っていた土人に、かきもと人麻呂ひとまろと云う詩人があります。その男の作った七夕たなばたの歌は、今でもこの国に残っていますが、あれを読んで御覧なさい。牽牛織女けんぎゅうしょくじょはあの中に見出す事は出来ません。あそこに歌われた恋人同士はくまでも彦星ひこぼし棚機津女たなばたつめとです。彼等の枕に響いたのは、ちょうどこの国の川のように、清いあまがわ瀬音せおとでした。支那の黄河こうが揚子江ようすこうに似た、銀河ぎんがの浪音ではなかったのです。しかし私は歌の事より、文字の事を話さなければなりません。人麻呂はあの歌を記すために、支那の文字を使いました。が、それは意味のためより、発音のための文字だったのです。しゅうと云う文字がはいったのちも、「ふね」は常に「ふね」だったのです。さもなければ我々の言葉は、支那語になっていたかも知れません。これは勿論人麻呂よりも、人麻呂の心を守っていた、我々この国の神の力です。

« Prenez par exemple les caractères chinois. Au lieu de nous conquérir, ils ont été conquis par nous. Parmi les natifs que j’ai connus il y a un poète nommé Kakinomoto no Hitomaro (n. 13). Dans ce pays il reste encore un waka (n. 14) de la Voie lactée qu’il a composé. Lisez-le. On ne peut pas y trouver ni Bouvier ni la Tisserande. Les amants qui y sont chantés sont justement Hiko-boshi et Tanabata-tsumé (n. 15). Ce qui résonnait à leur chevet était la sonorité du gué de la pure Voie lactée comme celle des rivières de ce pays. Ce n’était pas la clameur des vagues de la Galaxie, comme celles du Fleuve Jaune ou du Fleuve Bleu (Le Yangtsé). Par ailleurs, je dois aborder le problème de l’écriture plutôt que le waka. Pour transcrire le texte, si Hitomaro a employé les caractères chinois, ce n’était pas pour la signification, mais pour la prononciation. Après avoir introduit le caractère chinois qui désignait le bateau avec le son ‘chu’, le bateau, prononcé comme ‘funé’ en japonais, s’appelait toujours ‘funé’ (n. 16). Sinon, notre langage aurait été devenu le chinois. Bien entendu, ça ne dépendait pas de Hitomaro ; c’est la force des dieux de notre pays qui protégeait son cœur.

Note 13 :
Kakinomoto no Hitomaro (c. 662 – c. 710) est un poète hautement considéré pour ses wakas insérés dans la plus ancienne anthologie de la poésie japonaise, intitulée Le Man’yōshū (“Collection de dix mille feuilles”), compilée quelque temps après 759.

Note 14 :
Le mot waka a deux significations différentes mais liées. La signification originale était “poésie en japonais”. La définition ultérieure fait référence à la poésie en un mètre de 5-7-5-7-7.

Note 15 :

Hiko-boshi et Tanabata-tsumé sont des noms japonais désignant respectivement le Bouvier et la Tisserande.
Akutagawa souligne le fait que les Japonais continuent à les appeler par leur noms japonais, en les différenciant des noms chinois, malgré l’utilisation des caractères chinois.

Puis il évoque un waka de Hiromaro qui a chanté l’histoire des amants de la Voie lactée.
(texte original écrit en caractères chinois employés pour leurs sons)
天漢 / 梶音聞 / 孫星 / 与織女 / 今夕相霜
(traduction en japonais moderne)
天の川 / 楫(かじ)の音(ね)聞こゆ / 彦星(ひこほし)と / 織女(たなばたつめ)と / 今夜(こよひ)逢ふらしも
( traduction en français)
La Voie lactée / on entend le bruit de la barre ramée / et Hiko-hoshi / et Tanabata-tsumé / ils doivent se revoir ce soir

Note 16 :
Les Japonais gardent toujours cette tradition particulière de l’écriture : emploi des caractères étrangers en recourant seulement à leur sonorité au détriment de la signification.
On dit d’on-yomi pour la lecture phonétique des caractères d’origine chinoise, et, de kun-yomi pour la lecture sémantique qui ne reprend que leur sens en utilisant une prononciation japonaise, ou plusieurs quand elles existent.


のみならず支那の哲人たちは、書道をもこの国に伝えました。空海くうかい道風どうふう佐理さり行成こうぜい ―― 私は彼等のいる所に、いつも人知れず行っていました。彼等が手本にしていたのは、皆支那人の墨蹟ぼくせきです。しかし彼等の筆先ふでさきからは、次第に新しい美が生れました。彼等の文字はいつのまにか、王羲之おうぎしでもなければ褚遂良ちょすいりょうでもない、日本人の文字になり出したのです。しかし我々が勝ったのは、文字ばかりではありません。我々の息吹いぶきは潮風しおかぜのように、老儒ろうじゅの道さえもやわらげました。この国の土人に尋ねて御覧なさい。彼等は皆孟子もうしの著書は、我々の怒にれ易いために、それを積んだ船があれば、必ずくつがえると信じています。科戸しなとの神はまだ一度も、そんな悪戯いたずらはしていません。が、そう云う信仰のうちにも、この国に住んでいる我々の力は、おぼろげながら感じられる筈です。あなたはそう思いませんか?」

Les philosophes chinois ont également apporté dans ce pays la calligraphie extrême-orientale. Kūkai, Tōfū, Sari, Kōzei (n. 17), – Je suis allé là où ils se trouvaient, sans qu’on le sache. Ils prenaient tous comme modèles les traces d’encre des Chinois. Mais, au fur et à mesure du temps qui passait, de leurs plumes naissait une nouvelle beauté. Leurs écritures sont devenues graduellement les caractères japonais, et pas ceux de Wang Xizhi, ni de Chu Suiliang (n. 18). Par ailleurs, ce n’est pas seulement à propos des caractères que nous avons gagné. Nos souffles ont adouci, comme le vent de mer, les voies de Lao Tseu et de Confucius. Interrogez les natifs de ce pays, vous saurez qu’ils croient tous au naufrage inévitable du navire chargé des livres de Mencius, puisque ceux-ci provoquent facilement notre colère. Pas une fois Shinato, dieu du vent, n’a joué un tel mauvais tour. Mais dans cette sorte de croyance, nous sentons vaguement notre force à nous qui habitons dans ce pays. Ne pensez-vous pas ainsi ? »

Note 17 :
Kūkai (774 – 835), né sous le nom de Saeki no Mao, postérieurement appelé Kōbō Daishi (“Le Grand Maître qui a Propagé le Dharma”), était un moine bouddhiste japonais, calligraphe et poète, fondateur de l’école ésotérique du bouddhisme Shingon.

Tōfū (Ono no Tōfū), Sari (Fujiwara no Sukemasa) et Kōzei (Fujiwara no Yukinari) sont des calligraphes de l’époque de Heian, appelés « trois touches de pinceau » et considérés comme des fondateurs du style de calligraphie japonaise.

Note 18 :
Wang Xizhi, (321-379 ou 303-361) est un calligraphe et homme politique chinois de l’époque de la dynastie Jin. Il s’est éloigné des canons officiels en vigueur pour pratiquer une forme personnelle et libre, la calligraphie cursive. 

Chǔ Suìliáng (596-658) est un calligraphe chinois, historien et homme politique qui a servi en tant que chancelier durant les règnes des empereurs Taizong et Gaozong de la dynastie Tang.


オルガンティノは茫然と、老人の顔を眺め返した。この国の歴史にうとい彼には、折角せっかくの相手の雄弁も、半分はわからずにしまったのだった。
「支那の哲人たちののちに来たのは、印度インドの王子悉達多したあるたです。――」
 老人は言葉を続けながら、みちばたの薔薇ばらの花をむしると、嬉しそうにその匂をいだ。が、薔薇はむしられた跡にも、ちゃんとその花が残っていた。ただ老人の手にある花は色や形は同じに見えても、どこか霧のように煙っていた。
仏陀ぶっだの運命も同様です。が、こんな事を一々御話しするのは、御退屈を増すだけかも知れません。ただ気をつけて頂きたいのは、本地垂跡ほんじすいじゃくの教の事です。あの教はこの国の土人に、大日※(「靈」の「巫」に代えて「女」、第3水準1-47-53)おおひるめむち大日如来だいにちにょらいと同じものだと思わせました。これは大日孁貴の勝でしょうか? それとも大日如来の勝でしょうか? 仮りに現在この国の土人に、大日孁貴は知らないにしても、大日如来は知っているものが、大勢あるとして御覧なさい。それでも彼等の夢に見える、大日如来の姿のうちには、印度ぶつ面影おもかげよりも、大日孁貴がうかがわれはしないでしょうか? わたし親鸞しんらん日蓮にちれんと一しょに、沙羅双樹さらそうじゅの花の陰も歩いています。彼等が随喜渇仰ずいきかつごうしたほとけは、円光のある黒人こくじんではありません。優しい威厳いげんに充ち満ちた上宮太子などの兄弟です。――が、そんな事を長々と御話しするのは、御約束の通りやめにしましょう。つまり私が申上げたいのは、泥烏須デウスのようにこの国に来ても、勝つものはないと云う事なのです。」

 Déstabilisé, Organtino regarda de nouveau le visage du vieillard. Ne connaissant pas bien l’histoire de ce pays, il comprenait à peine une telle éloquence de son interlocuteur.
 « À la suite des philosophes chinois, c’était le prince Siddhārtha Gautama de l’Inde. — »
  En continuant son discours, il ramassa les roses sur le sentier et les sentit avec joie. Sur les traces des roses enlevées, il restait indéniablement leur parfum. D’autre part, quoique les fleurs dans ses mains semblassent garder la même couleur et la même forme, elles étaient en quelque sorte nébuleuses comme des brouillards.
 « Il en est de même pour le destin du Bouddha. Mais, les détails que je continue à réciter vous ennuient davantage sans doute. Ce que je voudrais attirer votre attention, c’est la théorie de ‘Honji-Suijaku’ (n. 19). Celle-ci a fait croire aux natifs de ce pays qu’Oo-Hirumé-Muchi et Grand-Soleil-nyorai (Vairocana) étaient les mêmes. Est-ce la victoire d’Oo-Hirumé-Muchi ? Ou bien, celle du Grand-Soleil-nyorai ? Supposons que les natifs de ce pays ne connaissent pas Oo-Hirumé-Muchi, alors qu’il y en a beaucoup qui connaissent Grand-Soleil-nyorai. Malgré cela, en regardant la figure du Grand-Soleil-nyorai, n’y voit-on pas Oo-Hirumé-Muchi, plutôt qu’un trait du Grand-Soleil-ryorai ? Moi, j’avais marché avec Shin-ran et Nichiren (n. 20) à l’ombre des fleurs du Sal (n. 21). Le Bouddha qu’ils adoraient avec extase n’était pas un homme noir à l’auréole. Mais c’était un frère du prince Kamitsumiya, aimable et plein de dignité (n 22). — Mais je m’arrête, comme promis, d’étendre cette sorte de récit. Ce que je voudrais vous dire, c’est qu’il n’y a rien qui gagne, même si cela vient à l’instar de Deus qui est venu dans ce pays. »

Note 19 :
Selon la a théorie de ‘Honji-Suijaku’,  les divinités bouddhistes indiennes apparaissent au Japon en tant que kamis indigènes pour convertir et sauver plus facilement les Japonais.
Certains kamis (mais pas tous) sont des manifestations locales (suijaku, littéralement, « trace ») des divinités bouddhistes (honji, littéralement, « fondement originel »).

Note 20 :
Shinran (1173-1262) est un moine bouddhiste japonais, fondateur de l’école bouddhique nommée Jōdo-Shinshū (« École véritable de la Terre pure »).

Nichiren (1222-1282) est un moine bouddhiste japonais, fondateur d’une nouvelle école du bouddhisme, la Nichiren Shū, appelée initialement Hokke-shū (École du Lotus).

Note 21 :
Le sal est un arbre mythique du bouddhisme ; le Bouddha est né sous un sal, qui aurait abaissé tout exprès l’une de ses branches pour que la mère l’attrape, tandis que les divinités brahmaniques faisaient pleuvoir des pétales de fleurs. 

Note 22 :
Le prince Kamitsumiya est un autre nom du prince Shōtoku.

Le prince Shōtoku a mis en place une politique visant à intégrer des aspects culturels et institutionnels avancés de la Chine des Sui, afin d’établir un système centralisé avec l’empereur au centre. De plus, il a fortement soutenu le bouddhisme et est devenu un objet de vénération dans la tradition bouddhiste japonaise ultérieure, connue sous le nom de culte du Prince Shōtoku.

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